Rit-on sans Riton ?
C’était il y a fort longtemps, à une époque où les Girondins de Bordeaux jouaient correctement au football.
Riton
Lacapuche, noble chercheur, fier devant l’éternel et ses étudiants,
écrivait des histoires pour ses lecteurs adorés. Il raffolait de ses
moments passés devant sa machine à écrire, même si tout était écrit par
son nègre, Fantaroux, par ordinateur. C’était sa récréation quotidienne
ou hebdomadaire, sa raison d’être, sa joie de vivre, et autres
expressions optimistes du même type. Il croulait sous les compliments,
ses journées étaient faites d'air pur, d'eau fraîche et de femmes
faciles.
Un beau jour, pourtant, plutôt triste en fin de compte,
il tomba en panne d’inspiration sur la route parsemée d’embûches de
l’écriture (phrase qui a obtenu la médaille de bronze au concours des
phrases du siècle de Montargis, en novembre dernier).
Pis, l’inspiration, quand elle était présente, ne le motivait plus à écrire.
Il
était las, comme ses lecteurs sans doute, qui n'étaient plus trop là.
Quelques visites certes, mais jamais de commentaires, comme si tout
était acquis. De la consommation pure et dure, sans rien en retour. Un
comportement classique du monde moderne. Un peu comme l’ami qui croit
votre amitié acquise, ne donne aucune nouvelle, et qui ne comprend pas
que vous vous éloigniez de lui progressivement. Tout s’entretient, ce
n’est pas ma femme de ménage qui dira le contraire.
Alors, manque
de reconnaissance, période difficile, sentiment de lassitude, ou un
mélange des trois ? Peu importe, Riton n’eut plus envie.
Pour empirer
les choses, il accepta de s’investir dans d’autres projets et, pris par
le temps, s’éloigna de plus en plus de son terrain de jeu favori.
Aujourd’hui,
il est toujours aussi occupé, et même quand il ne fait rien, son esprit
travaille pour lui. Métro, boulot, insomnie, dodo rythment son
quotidien. L’envie d’écrire n’est toujours pas revenue, la motivation
non plus. A quoi bon écrire si l’on n’y trouve aucun plaisir ? A quoi
bon se creuser la cervelle quand personne n’attend rien de vous ?
Cela
dit, Riton se soigne, à fortes doses de remises en questions. Il essaye
d’ignorer autant que possible son prochain, qu’il juge plus néfaste que
bénéfique (élu vacherie de l’année au comice agricole de
Cornemuse-sur-Roulettes, en 2008). Il tâche d’avancer sans trop
flancher, de trouver sa place dans ce monde étrange. Peut-être même
qu’il retrouvera un jour le chemin des petits oiseaux et de la rigolade,
le long duquel souffle ce vent de liberté que le jeune enfant reçoit en
pleine face, chaque soir, à la sortie de l’école… Qui sait ?
Riton.